Au moins 12 morts dans des combats opposant Arménie et Azerbaïdjan
De nouveaux combats ont opposé mardi l'Arménie et l'Azerbaïdjan, provoquant la mort d'au moins 12 personnes, malgré les appels internationaux à la retenue, notamment de la Russie, la grande puissance régionale.
Ces affrontements, dans le district frontalier de Tovouz, mettent face-à-face deux ennemis de longue date et constituent les heurts les plus graves depuis plusieurs années.
L'Azerbaïdjan a annoncé mardi la mort de sept de ses militaires, parmi lesquels un général et un colonel, ainsi que d'un civil.
L’Arménie a fait état le même jour de ses premières pertes avec la mort de quatre membres de ses forces armées, sous des tirs ennemis.
Au total, 16 personnes ont été tuées des deux côtés de la frontière depuis dimanche.
Ces deux ex-républiques soviétiques sont en conflit depuis des décennies autour de la région séparatiste du Nagorny-Karabakh en Azerbaïdjan, un territoire en majorité peuplé d'Arméniens ayant fait sécession, avec le soutien d'Erevan, au début des années 1990. Cela avait alors déclenché un conflit qui avait fait 30.000 morts. Un cessez-le-feu précaire est en vigueur depuis 1994.
Les affrontements aux abords de cette région sont assez fréquents, mais les combats à la frontière azerbaïdjano-arménienne, comme ceux en cours actuellement, sont beaucoup plus rares.
- «Médiation» russe, «condamnation» turque -
Les deux camps se rejettent la responsabilité du déclenchement des hostilités.
Pour le troisième jour consécutif, le ministère azerbaïdjanais de la Défense a accusé l'Arménie d'être passée à l'offensive avec des tirs d'artillerie, de mortiers et de mitrailleuses lourdes.
L'Arménie a pour sa part affirmé que l'Azerbaïdjan l'avait attaquée en «utilisant l'artillerie, des chars et des véhicules aériens sans pilote», tandis la diplomatie arménienne a prôné une «réponse proportionnée» à ces «agressions».
Ces combats ont conduit ces derniers jours Moscou, Washington et l'Union européenne à appeler à un cessez-le-feu.
Le Kremlin, l'un des médiateurs dans le conflit du Nagorny-Karabakh, s'est déclaré mardi «profondément préoccupé» et a exhorté l'Azerbaïdjan et l'Arménie à «la retenue».
Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a proposé une «médiation» russe pour tenter de mettre fin aux hostilités.
Pour sa part, la Turquie, un ennemi de longue date de l'Arménie, a apporté son soutien à l'Azerbaïdjan, un pays allié turcophone. «Nous condamnons fermement les attaques arméniennes», a déclaré mardi le président turc Recep Tayyip Erdogan, assurant qu'il s'agit d'un acte «délibéré visant directement l'Azerbaïdjan».
Cette aggravation des tensions intervient peu après des propos du président azerbaïdjanais Ilham Aliev, qui avait menacé de quitter les pourparlers de paix sur le Karabakh, jugeant que Bakou avait le droit de chercher «une solution militaire au conflit».
- Pas de grande guerre -
Une guerre ouverte entre Bakou et Erevan pourrait déstabiliser toute la région du Caucase, où Moscou et Ankara notamment ont des intérêts géostratégiques concurrents.
Un tel risque est désormais «très élevé», pense l'analyste politique azerbaïdjanais Elhan Shahinoglu, selon lequel «un général azerbaïdjanais a été tué et Bakou va riposter».
Pour son collègue arménien Hakob Badalian, ce scénario est cependant peu probable.
«Bakou et Erevan, ainsi que les puissances géopolitiques régionales, ne veulent pas de grande guerre, car ils savent qu'elle pourrait avoir des conséquences catastrophiques», a-t-il déclaré à l'AFP.
Il y a quatre ans, «l'Azerbaïdjan avait la supériorité militaire face à Erevan, mais l'Arménie a depuis rétabli l'équilibre» avec l'achat d'armes sophistiquées russes, croit-il savoir.
En 2016, des heurts armés autour du Nagorny Karabakh avaient failli dégénérer en guerre ouverte entre ces deux pays.
Les dépenses militaires de l'Azerbaïdjan, une puissance pétrolière, sont supérieures à la totalité du budget de l'Arménie. Mais cette dernière appartient à une alliance politico-militaire dirigée par Moscou, l'Organisation du traité de sécurité collective.
Ce conflit fait l'objet depuis 1992 d'une médiation russo-américano-française au sein de l'OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe), baptisée le Groupe de Minsk.